Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
2 février 2013 6 02 /02 /février /2013 10:18

 

She’s on Duty, Park Gwang-choon, 2005

1.jpg


 

« T'as vu nos vies tournent en rond/A ton avis à cause de qui ici on tourne en rond ?/Et tu crois quoi, qu'j'vais dire que c'est à cause de l'Etat ?/Quand tu plantes ton frère, /Est-ce que c'est Jacques Chirac qui prête son bras ?»

 

Mars 2006. 14 heures. Spliff de Willie Nelson, écouteurs du MD vissés dans les oreilles et doigts de pieds en éventail, disc jockey Illi’ Dilli’ se replonge dans Fabe, les années 90 et l’année 2000. Putain d’albums : Befa surprend ses frères, Le Fond et la Forme, Détournement de son et La Rage de dire. Fait chier tous ces artistes qui avaient encore des choses à dire et arrêtent, disons-le prématurément (six ans de carrière à tout casser). Ca fait partie de mon passé, Lettre au Président, Nuage sans fin et L’argent facile… autant de bonnes choses restées en l’état qui me ramènent au free fight se jouant sur l’écran de mon PC, au boulot qui m’attend aujourd’hui et à l’un de mes assistants polyvalents qui ne pointe toujours pas le bout de son nez à l’heure de prendre son quart. Je l’ai perdu de vue hier soir aux alentours de vingt heures dans le frigo, derrière les étagères qu’il approvisionnait de canette de soda. A son âge ce grand benêt devrait savoir qu’il faut porter un blouson dans ce froid orchestrés par les climatiseurs. Je prends une nouvelle taffe de bedeau et laisse ma tête retomber en arrière pour admirer les néons de mon bureau sans fenêtre, à l’arrière-boutique d’une station-service, perdue le long de la francilienne. Y a pas à chier, la vie c’est mieux dehors. 

 

Une dizaine de minutes plus tard, je suis réveillé par une étrange sensation au niveau du zen. Quelque chose pianote sur mon pif, surfant sur l’étendue de peau de mon tubard. D’un revers de main, je renvoie le musicos et dévisage mon assistant polyvalent. Le con a l'air content de lui, et enrhumé. Aucun mot n’est échangé, puis il me gratifie d’un rot des plus bruyants avant de partir travailler. « Toi, t’as bu un soda en fffe… en scred, quoi. Passes-le en démarque inconnue, c’est pour moi. » 

 

Je me redresse sur mon siège, dégage les écouteurs de mon MD et zieute l’écran des caméras de surveillances pour voir si mes deux assistants polyvalents sont bel et bien à leur poste en train de travailler. Pendant que l’un encaisse, le retardataire roteur choisit les magazines qu’il feuillètera derrière la caisse entre deux clients : Maximal, Newlook (vieux souvenir de Tabatha Cash qui en faisait la couv’. Qu’es-tu devenue Tabatha, toi, les films de cul, Skyontherock et tes pitbulls ?), Entrevue, FHM, Choc,… en bref que de la grande littérature. 

 

2

 

 

Au lieu de taper une gueulante comme tout mauvais manager le ferait, je laisse couler et au lieu de lancer ma sauvegarde journalière, je lance un divX. Une comédie d’action policière sudco : She’s on Duty, film de 2005, topé un peu par hasard en cherchant des torrents de films de Clara Morgane. Oh yeah ! Le titre du film aurait été parfait pour un film de boules, classé X comme Rocco et pour diffusion tous les premiers samedi du mois sur canal actif. Tabatha. Encore, encore… oooh Taaabathaaa, je pense à toooiii, j’aaaiii les... j’arrête avant d’avoir les dessous mouillés. Tandis que VLC projette la sauce (piquante, blanche wesh Kebab), je ramasse les bulles pleine de billets dans le coffre-fort. Je m’installe devant le film qui commence et me met à compter les thunes des caisses du matin. Hé, là. Oh ! Minute-là ! Je demande un temps-mort ! On se fout de moi ? Oh mais remboursez-là ! Vous avez vu la nana, le protagoniste principal au féminin ? Recherche rapide sur le net, je tapote dans la barre Lycos : Kim Seon-ah. ‘Tain mais merde, elle n’a rien avoir avec une Tabatha ou Clara en puissance la nana ! Je continue de m’exclamer, excusez du peu. Vous avez vu les affiches de She’s on Duty ? Vous avez vu la donzelle qui s’affiche en mini-jupe et pétard… hum entre les mains et entre… enfin plutôt contre la cuisse ?

 

3.jpg

 

La vérité vraie c’est qu’on a plutôt droit à ça :

 

4.jpg

 

Pas qu’elle soit dégueu’ en soi, hein ? Je ne dirais pas nan surtout si ça peut éviter que j’utilise ma main gauche en mode solitaire. Bref. Ils nous ont tout de même eus sur la marchandise les salauds. Par le producteur de Windstruck (Jeon Ji-hyeon d’un côté) et Hypnotized (Kim Hye-soo de l’autre), Jeong Hoon-tak. On peut dire que ton équipe de com’ l’a joué fine Hoon-tak. On peut dire aussi que sur ce coup, t’es le Hugh Hefner du pauvre. Enfin heureusement, très vite, on aperçoit les jolis minois de Hong Soo-ah (la bad girl de service) et Nam Sang-mi (la girly mimi toute frêle également de service) pendant que je compte mes billets de dix et vingt euros avec lesquels je fais un petit tas devant moi. Ce n’est pas Tabatha, ni Clara mais c’est déjà ça. Je reste sur la fiche du film du site Cinemasie. Je note que le réalisateur, Park Gwang-choon met en scène ici son deuxième long-métrage. J’ouvre une nouvelle fenêtre web sur cineasie.com, ça raconte bien l’histoire d’une jeune policière, véritable garçon manqué, toujours pas marié à son âge qui infiltre, sous la demande de sa hiérarchie un lycée. Son but est de faire amie-amie avec Seung-hee, la fille d’un membre d’une organisation criminelle que tous recherches, policiers comme malfrats (il serait le numéro 2 de son clan à ce que j’en ai compris en faisant mon petit tas de billets de 50 euros). L’homme est le témoin à charge dans une affaire qui peut condamner le chef de la pègre, un fou furieux à la crinière blanche ayant un souci avec les perfusions sanguines. La mission est simple : en s’approchant de Seung-hee, la police espère ainsi mettre la main sur son papa… les bases sont posées. 

 

Alors que je rallume mon spliff de Willie Nelson pour en tirer quelques lattes. J’ai comme qui dirait une illumination. Rien à voir avec la verdure que je fume et le trip sous LSD liquide de 1858 à Lourdes, nan, nan. Ca me tape-là dans la caboche, sans même prévenir. She’s on Duty, ce n’est rien de moins que le film-clone de ce film hongkongais de 1991 (le premier volet). Ce n’est rien d’autre que le remake de ce film avec dans le rôle principal Stephen Chow. Oui, oui, je parle bien ici de Fight Back to School. D’ailleurs ce pur produit du Joel Silver asiatique (avec le succès en plus), j’ai nommé Wong Jing en personne, est grosso modo l’adaptation au cinéma de la cultissime série 21 Jump Street dans laquelle trainait la délicieuse Holly Robinson (Dieu, ce gloss. J’en aurai bouffé par kilo de lèvre). On pourrait également citer du même bonhomme son Truant Hero (1992) dans lequel un policier infiltre un lycée en se faisant passer pour un professeur et mettre ainsi la main sur le fils d’un membre de triade dont la vie est menacée. J’imagine aisément ce que ces enfoirés de scénaristes sudco (au nombre de trois) ont pu se dire aux brainstormings du matin tout en dégustant leur café Starbucks. 


Le premier : « Hier les mecs, sur une chaine du câble, je suis tombé sur une soirée spéciale 21 Jump Street. » 


Le second : « Et moi, ce film avec Stephen Chow qui joue le rôle d’un flic qui infiltre un lycée pour retrouver une arme. »


Sur quoi, le troisième : « Marrant, le film que j’ai vu traitait également d’un flic qui infiltrait un bahut en tant que professeur pour retrouver le fils d’un mafieux. Attendez les mecs ! J’ai une idée à proposer aux cravatés du dernier étage. Et si on faisait un mix de tout ça à notre sauce kimchi ? » 


A ce moment-là, eux aussi, ils l’ont eu leur illumination collective, genre Fátima 1917. Voici donc ce qu’est grosso modo (hein ?) She’s on Duty

 

 


 

 

Et aussi…

 

 


 

 

Tandis que j’écrase le cul du stick dans le cendar, je me demande s’ils feront un jour l’adaptation ciné de 21 Jump Street aux states. Ça pourrait être une bonne idée à coller sur le papelard. Je range mes biftons comptés et rangés par liasses à nouveau dans le coffre-fort et pose mon cul sur ma chaise de bureau à roulette. Je continue de visionner She’s on Duty et Kim Seon-ah qui se fait passer pour une lycéenne. Si les héros de 21 Jump Street affichaient des mines de jeunots qui leur permettaient de se fondre dans la masse estudiantine, il faut bien avouer qu’il manque un ou deux liftings à notre héroïne. Cette dernière en profite d’ailleurs pour mettre la pression aux dures à cuir du bahut. Ce n’est pas plus mal qu’elle fasse réellement son âge la Kim Seon-ah et non celui d’une lycéenne lambda. Il y a un décalage bienvenu qui renforce l’aspect humoristique de l’œuvre. Personne ne semble faire attention de quel(le) adulte se cache derrière ce costume d’étudiante. En parlant comédie, elle se base essentiellement et forcément sur ce même décalage générationnel, intra et inter. Par le passé, le personnage de Kim Seon-ah était loin d’être une flèche en cours et se retrouver au moment présent comme si elle était quelques années en arrière livre des scènes cocasses : les devoirs, les contrôles, les coups de pression par les professeurs (et élèves) et j’en passe. Il ne manque plus que la romance qui s’invite naturellement avec un bellâtre campé par l’acteur Gong Yoo, sourire de jeune premier à l’aura énigmatique. On comprendra très vite que lui aussi joue un rôle de poids dans l’histoire et qu’il n’est pas une joli vase qu’on pose là pour décorer (bécane et bastons au programme). 

 

5_1.jpg

 

5_2.jpg

 

Sans ça, She’s on Duty m’a fait cogiter sur l’existence, le temps qui passe et… je ne sais plus. Je devrais aller jauger manuellement mon carburant restant dans les cuves de la station. Ainsi, je pourrais réaliser ma commande qui attend d’être faite mais je préfère laisser le film se terminer. Je me demande comment les choses se passeraient si je devais débarquer à nouveau au lycée. Est-ce que les jeunes portent-ils encore des survêt’ Lacoste et Sergio Tacchini ? En tant qu’étudiant, on n’a pas à se soucier de grand-chose, juste de sa petite vie. On ne paie pas de factures, on ne se prend pas la tête à faire les courses, etc… mais en même temps, le cafard total (ou presque). Je comprends Kim Seon-ah lorsqu’elle se retrouve au tableau en plein cours de maths. Le vrai coup de pression, sans déc’. Qui se souvient encore des logarithmes népériens ou des probabilités conditionnelles ? Finalement la vie d’adulte c’est chiant mais le bahut ça l’était encore plus, sans compter les poussées d’acnés. Et ça, Kim Seon-ah l’a compris. Et c’est pour cela qu’elle se démène dans la mission qui est la sienne dans ce milieu pubère hostile tout en s’interpellant sur l’amour qu’elle commence à porter à un jeunot, elle la vieille peau. 

 

She’s on Duty se révèle alors comme une comédie policière comme on a pu en voir des tas depuis que le cinéma existe. Il n’y a rien de nouveau. Il est juste fait avec des artifices connus où tout est soigneusement jaugé (comme mon carbu’). Mais il est une comédie policière qui se tient et avec laquelle on passe un moment sympatoche. Alors oui, le bousin est linéaire à souhait et sans surprise avec les éternels traitres de services (comme ma station) qu’on voit venir de loin. Alors oui, c’est parfois exagéré dans certaines mises en situation mais finalement il se montre comme un film pop-corn honnête. Un film pop-corn rondement mené et avec lequel on ne voit pas le temps passer. Park Gwang-choon parvient à concilier surtout à marier avec panache humour, mélodrame et action pour nous offrir un film réussi (même si le verbe est un peu fort) qui saura (normalement) plaire aux plus grands nombre. Le seul gros bémol résidera dans le personnage féminin campé par Lee Eon-jeong. Elle est le bras droit mutique du big boss dont émane une aura sadique, très « james bondien ». Et lorsque vient le climax où elle devrait montrer de quel bois elle se chauffe… que dalle ! Expédiée, torchée et donc grosse frustration de ce côté-là.

 

6_1.jpg

 

6_2.jpg

 

Générique final. Pas mal cette Kim Seon-ah. Elle donne bien même si son jeu est supra caricatural. En moi, une envie. Je veux une rate, une seuf, une meuf mais je veux, veux, veux une… minute ! Je fixe de mon regard aux traits froncés mon écran de vidéosurveillance. Deux jeunes viennent d’entrée dans la boutique. Je les connais ceux-là. Mes voleurs de magazine de cul ! Je scrute mon « hall of fame » des gus attrapés la main dans le sac et arrête mon regard, toujours les traits froncés sur une photo…

 

7

 

 

Mes lascars… comme on se retrouve… 

 

 

Partager cet article
Repost0

commentaires

O
On y a pensé avant moi. La bêtise humaine est donc bien pleine de ressources.
Répondre
I
Aaah le règne de photoshop Oli... mais bon, on en n'est pas encore là :<br /> <br /> http://www.lexpress.fr/culture/cinema/drive-une-femme-porte-plainte-contre-une-bande-annonce-trompeuse_1038846.html
Répondre
O
Cette publicité mensongère... Il y a presque vice (c'est le cas de le dire) de forme. Moi si j'avais payé ma place de ciné pour voir ça je les aurais attaqués pour être remboursé!
Répondre