Leafie, Oh Seong-yoon, 2011
Logique dans sa volonté d'offrir aux parisiens un panorama complet du cinéma coréen, le Festival Franco-Coréen du Film 2011 se bouclait ce mardi 18 octobre avec un film d'animation du nom de Leafie, allée grand public, rayon pour enfant. C'est vraiment pas bien méchant, c'est plein de couleurs bien saturées, on est à des années lumières d'un Aachi & Ssipak, on en reparlera.
Rendez-vous est donné à 20h au cinéma Saint André des Arts et après un petit délai tout ce qu'il y a de plus « franco » on entre dans la salle à la suite de l'ambassadeur de Corée. Je dis « on », parce que je m'assois entre David Tredler de l'impossible blog ciné (on ne lui toujours pas offert son twix d'ailleurs, ça va finir par jaser) et un ami à lui qui revient de Corée. Sans Congo est resté chez lui goûter un repos bien mérité.
La salle est pleine, le cérémonial commence, on attribue le prix Mubi du court métrage à Space Radio et le prix FlyAsiana à Make Up, les deux sont encore en ligne jusqu'à la fin du mois. On aura peut-être l'occasion de faire un article là dessus mais en attendant la fin du mois ne va pas vous attendre alors voilà les liens :
http://mubi.com/films/space-radio
Une cérémonie de clôture c'est l'occasion de remercier tout le monde (on applaudit bien fort l'équipe des schtroumphs du FFCF) mais aussi l'heure des bilans : une fréquentation en augmentation de 75% par rapport à l'année dernière, plusieurs séances combles et des films sélectionnés récompensés en parallèle en Corée par l'un de leurs équivalents des Césars : Bleak Night meilleur premier film, Kang Hyeong-cheol (Sunny) meilleur réalisateur. Quand on vous disait que lorsque Pierre Ricadat conseille un film il faut aller à le voir sans brocher... faut croire qu'on l'écoute jusqu'en Corée. Putain, j'allais oublier l'épisode marquant du passage « remerciements » : petite surprise des organisateurs, Jung Yumi est présente lors de cette cérémonie de clôture, et surtout Jung Yumi est juste derrière nous ! Bon je ne vais pas jouer les fans boys, j'ai vu très peu de ses films, je ne suis vraiment pas fan d'Hong Sang-soo et j'étais malade lors de la session où elle rencontrait le public. Mais bon, ça fait un petit quelque chose. Le frisson suivant, c'est Dong-suk qui le provoque, en annonçant qu'il s'agissait du dernier épisode du FFCF. Quoi ? Dernier épisode, dernière séance non ? Non, il insiste, c'est bien le tout dernier FFCF. Merde, sans prévenir, comme ça, c'est pas poli... N'en faisons pas plus, en fait le festival change de nom pour un truc plus lisible : le Festival du Film Coréen de Paris. Bravo tout le monde, clap clap clap, à l'année prochaine, le film commence.
Leafie, c'est l'histoire d'une poule qui en a marre de pondre des œufs à la chaine et qui rêve de vivre dans la basse-cour. Leafie c'est d'abord un livre vendu écoulé à plus d'un million d'exemplaires. Leafie, c'est ensuite 6 ans de boulot et plus de 2 millions d'entrées en salle en Corée. Leafie, c'est l'affirmation de l'animation coréenne qui refuse de plus en plus de se contenter de jouer les sous-traitant pour les américains et les japonais. Leafie c'est aussi un film familial, qui ne prend pas tant de risques que ça, et qui à deux trois détails près, aurait pu être produit n'importe où dans le monde. Enfin, Leafie, c'est le nom de la poule que l'on va suivre tout au long du film, celle qui frôle la mort pour sortir de sa cage, celle qui est rejetée par la basse-cour, celle qui va devoir apprendre à vivre dans la nature, élever un canard et affronter une belette. Dans un autre contexte, cette critique aurait pu s'arrêter là, j'aurais parlé des couleurs affirmées, du côté léché mais un peu creux de la forme, des pitre et puis voilà. Mais là...
… il y avait clairement deux parties dans le film, un avant et un après, symbolisé par la disparition de deux personnages clés : Voyageur, le canard colevert auquel Choi Min-sik prête sa voix à l'écran, et Jung Yumi et son rire de petite fille dans la salle. Au bout d'une demi-heure de bonheur bercée par la voix d'un demi dieu et le rire d'une nymphe, le rêve s'est dissipé et les deux nous ont laissés orphelins, plus de « regards perdus dans l'horizon et en contre-jour» du canard beau-gosse avec sa mèche au vent, plus de tentation de jeter un coup d'oeil derrière son épaule pour voir Jung Yumi rire à la moindre de ses apparitions. Colevert meurt et Jung Yumi sort de la salle. Carton rouge et penalty, c'est la double peine et vous verrez, à partir de ce moment là, la redescente peut-être terrible.
Alors voilà, on peut quand même dire deux mots de la place intéressante laissée à la mort dans ce film mettant en scène le règne animal, elle est toujours traitée avec une grande sobriété et fait véritablement partie de la vie. C'est le cycle de la nature et, chose remarquable, même la fin va dans ce sens là (gros SPAM : après avoir laissé son canard de fils s'envoler avec le reste de sa troupe, elle se laisse manger par la belette qui meurt de fin et doit nourrir ses enfants).
Espérons que l'histoire ne retiendra pas que le festival franco-coréen du film aura rendu l'âme en même temps qu'un poulet. Le FFCF est mort, longue vie au Festival du Film Coréen à Paris.