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17 juillet 2013 3 17 /07 /juillet /2013 20:21

 

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A Holiday in Seoul, Lee Yong-min.

 

Nam Hi-won (jouée par l’actrice Yang Mi-hi) est une obstétricienne à l’hôpital Venus – ça ne s’invente pas –. Son mari, Son Jae-kwan (No Neung-geol) est un journaliste. Séoulites, cela va sans dire, le couple est dans la quintessence de cette nouvelle classe sociale argentée dont les réalisateurs comme Han Hyung-mo ou Shin Sang-ok esquissent dans les années qui suivent de gourmands archétypes. Ils décident de passer une journée de congés ensemble – d’où le titre du film –.

 

Comme souvent, le film est introduit par une séquence en forme de prémices, durant laquelle on découvre un personnage secondaire, vieux soudard accoutumé aux nuits passés à dormir sur des bancs publics. Le contraste est volontairement accentué en vue d’introduire la demeure cossue et bourgeoise des époux. Comme une rupture désinvolte des règles du récit, le fils de ce vieillard, d’allure modeste, donne à la camera le montant du salaire de son père. Plus tard dans le film, on parlera de cravate coquette représentant la moitié d’une année de travail du bougre. Histoire que chacun reste à sa place. En surplomb, la voix du narrateur-moralisateur s’étonne de ce que les gens se lèvent tard.

 

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En attendant, les époux commencent la journée comme des ados attardés coincés dans des corps d’adultes. Ils se figuraient, lambinant autour d’un programme proto-hipster dont ils prenaient un plaisir louvoyé à retarder le départ, de resto en ciné, de ciné en shopping. Lee Yong-min étale en l’espace d’une séquence une réussite insolente et lourdement fardée. Lorsque Hi-won détaille par le menu le riche programme qu’elle a concocté, elle met son couple en scène : son programme est le programme d’une classe sociale. On se prendrait presque à regretter le compte instagram qu’ils ne peuvent pas encore alimenter.

 

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Envoyés extraordinaires et impuissants d’une classe qui émerge, le couple vit sous filtres, une dizaine tout au plus. Ce qui donne, à l’aspect catastrophique que le réalisateur a souhaité introduire dans cette belle journée tranquille, un caractère courtois et convenu. C’est un film très propret, très tranquille, un film qui ressemble à un grand magasin d’électroménager en zone industrielle à la sortie d’une grande ville de province.

 

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Alors évidemment, A Holiday in Seoul montre ce à quoi on peut prétendre lorsqu’on est suffisamment touché par la grâce – et peut-être déjà, par le pouvoir en place –. En dehors de la trame du scénario, il donne l’impression d’enchaîner les postures-clés correspondant à une pièce très enviable de l’échiquier social d’alors. En ce sens, les personnages semblent très vite ne plus s’appartenir, s’effacer, se recroqueviller avant de muer en principes d’expression d’un mécanisme finement réglé, enduit de ce que le zeitgeist pouvait légitimement accepter. Entre autres : jouer les hidalgos burnés en chantant O sole mio à une mijtonneuse dont on veut pécho le 06. Pour tout le reste, c'est un peu comme Capital sur M6 : l'argent dont vous rêvez mais que vous n'aurez jamais. 

 

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Tout roule, tout glisse dans A Holiday in Seoul. On y vit une journée dans et avec, avant de saluer tout ce beau monde en se promettant de reprendre contact prochainement parce que, quand même, elle était très sympa cette idée de prendre un thé glacé ensemble en terrasse. Ce sentiment jette le trouble sur l’intention véritable du film. S’agissait-il de montrer Monsieur et Madame Tout-le-monde dans sa petite médiocrité quotidienne ou, à l’inverse, avait-on à faire à une fiction complètement assumée. Des éléments abondent dans le sens des deux thèses. Le réalisme se verrait soutenu par le fait qu’une large part de ce film n’avance pas, stagne, et se contente d’observer le grand jeu de la société où médisance, envie et conformisme trônent comme des trophées dans le palmarès du parfait petit bourgeois. A l’inverse, la fiction et l’imaginaire sont entretenus par les péripéties – modestes somme toute – des principaux personnages, que la malveillance des pairs et le cours de circonstances contribuera à éloigner, avant de les voir se rapprocher à la fin du film pour ponctuer cette – ouf ! – journée terriblement exaltante qu’on ne manquera pas de raconter à nos amis, parce que franchement hein, franchement là c’était super sympa.

 

Dans cette belle toile soyeuse et régulière, deux personnages tranchent par le désespoir qu’ils portent : une femme qui est devenue folle en raison de la perte de son fiancée, et un homme riche et avancé en âge que sa jeune femme mène par le bout du nez – et qu’est-ce qu’elles sont matérialistes les femmes dans ce film ! –. Ils supportent chacun une peine qui fait tache dans l’harmonie forcée qui les entoure. Ces deux sentinelles sont pratiquement des vigies au service du jeune couple – ils sont confrontés à eux au cours de leur journée –. Finalement, leur mal-être apparaît comme authentique là où tout le reste n’est que théâtre.

 

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Pour tout le reste – hommes et femmes confondus, le réalisateur semble au moins équitable sur ce point – c’est coup de putes et mauvaises langues. Entre les deux, le couple heureux cherche sa voie. Il penchera en faveur de l’authenticité, of course. Finalement, le monde qui est décrit est assez dur en dépit des apparences, probablement parce qu’il semble dire que tout n’est qu’apparences, apartés et épiements.

 

 

Dépassant la fiction, et bien authentique elle aussi, la traditionnelle baston bien sentie où on peut apercevoir, entre autres réjouissances, étranglements généreux, corps à corps langoureux, chassés énergiques et une manière très audacieuse de tenir quelqu’un en joue avec un pistolet. Ah ! S’il y a bien un domaine dans lequel le cinéma sud-coréen ne nous décevra jamais, c’est bien dans la franche et virile camaraderie ! 

 

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